La gentrification des esprits, Sarah Schulman – Extraits
Ayant désactivé mon compte Insta principal pour une durée indéterminée, j’ai envie d’archiver certains de mes posts notables ici. Si tu me suivais pas là-bas, peut-être tu vas les lire pour la première fois. Sinon, c’est probablement une chouette occasion de les redécouvrir. Bonne lecture !
Le dernier chapitre du livre La Gentrification des Esprits écrit par Sarah Schulman parle du rapport au bonheur, au confort et à la manière dont le capitalisme lie les deux au point de nous faire penser qu’on ne peut pas être heureux si on se retrouve dans des situations inconfortables. En voilà quelques extraits :
« L’idée du bonheur avec laquelle nous vivons est basée sur l’affaiblissement d’autres personnes. Mais nous ne nous questionnons pas car nous tenons à cette idée du bonheur qui écarte la notion d’inconfort. Être dans l’inconfort va de pair avec la responsabilité. Mais le fait est que nous vivons selon des valeurs culturelles stupéfiantes, qui rejettent à tout prix l’inconfort, et que nous payons le prix d’une fausse vie, vécue aux dépens des autres, dans une société injuste. »
Elle continue avec l’idée que cette notion nous rend insupportable le fait d’être mis⋅es mal à l’aise. Au point de vivre l’inconfort comme une attaque anti-sociale.
« Notre concept du bonheur exclut toute question gênante ou toute vérité susceptible de mettre certaines personnes mal à l’aise. Être mal à l’aise ou mettre des personnes mal à l’aise est considéré comme anti-social puisque la révélation de la vérité fragilise dangereusement la suprématie. En conséquence, dans notre société, le bonheur des privilégié⋅es est basé sur le fait de ne jamais se mettre en position d’avoir à rendre des comptes. »
Elle finit en explorant les manières de s’en sortir :
« Si nous voulons transformer nos manières de vivre, il faudra faire de nouveau rentrer l’inconfort dans nos vies, comme processus naturel de l’être humain, et comme responsabilité personnelle. Une fois que nous acceptons le fait que cela ne va pas nous tuer et que nous nous engageons dans ce processus, il s’avérera à force bien plus tolérable. Une fois que la prohibition de l’inconfort sera révole, le démantèlement de la gentrification et de l’idéologie suprémaciste fera partie intégrante de nos vies, et en constituera l’aspect le plus intéressant. Ce sera stimulant, et même excitant au final – j’aime me rendre compte que je suis mal à l’aise et essayer de comprendre pourquoi. Ma vie intérieure n’en est que plus riche, je me sens plus profonde et plus humaine.